Des espèces communes …
Toutes les espèces se valent-elles ?
Les campagnes de préservation de la biodiversité mettent souvent à l’honneur des espèces en voie de disparition ou des espaces exceptionnels par la rareté de leurs milieux naturels, quitte à donner parfois l’impression qu’il serait nécessaire de partir dans des pays lointains ou de mener des actions extraordinaires pour participer à la protection de la nature.
Il existe cependant une multitude d’espèces dite « ordinaires » qui peuplent notre quotidien.
Cette biodiversité est présente partout, même dans les endroits les plus urbanisés. Visible au quotidien, elle est constituée d’espèces parfois mal aimées : mauvaises herbes, espèces dites nuisibles ou coupables de « délit de sale gueule ».
C’est elle qu’on peut appeler biodiversité « ordinaire «, bien qu’elle soit difficile à définir précisément.
…impactées par les activités humaines
Ces espèces bien qu’elles ne soient en général pas menacées de disparition**,** souffrent elles -aussi de la pollution, de la bétonisation, de la fragmentation des milieux naturels et de l’exploitation intense des ressources naturelles.
La fragmentation des habitats, une menace pour le cycle biologique des espèces
Pour de nombreuses espèces qui cohabitent avec nous, le défi majeur est de réussir à se nourrir, se loger, se déplacer au sein d’espaces de plus en plus réduits et de moins en moins accueillants. Par exemple, la plupart des grenouilles, comme la grenouille agile, ont des capacités de déplacement limitées à un à deux kilomètres.
Au sein de ce petit territoire, elles doivent absolument avoir accès à une mare pour se reproduire et à des zones de friches ou de prairies pour se nourrir.
Le moindre aménagement, entraînant destruction d’une mare ou construction d’une route, peut rapidement porter atteinte aux capacités de reproduction de l’espèce.
Pourquoi préserver toutes les espèces, même celles que l’on n’aime pas, est important ?
La nature sous toutes ses formes nous rend un grand nombre de services, que les experts nomment « services écosystémiques » : pollinisation, qualité de l’air et l’eau, formation des sols, approvisionnement en matières premières.
Or, dans tout écosystème, le maintien de la diversité spécifique qui le constitue est essentiel pour assurer sa résilience : plus un écosystème est riche et complexe, plus il serait capable de se maintenir et de s’adapter.
C’est pour cela que la conservation de la biodiversité implique celle des espèces banales, communes, qui forment l’essentiel des systèmes écologiques, et y remplissent la majorité des fonctions.
Comment les préserver ?
La préservation de cette biodiversité passe par d’autres types d’action que les politiques traditionnelles de créations de sanctuaires, où les activités humaines sont limitées voire interdites : parcs nationaux, réserves naturelles, etc.
La préservation des corridors écologiques
A l’échelle locale, elle passe notamment par la protection ou la création de corridors écologiques, appelés également « trame verte et bleue », soit l’ensemble des milieux naturels et aquatiques qui permettent aux espèces de se déplacer pour se nourrir, se reproduire, s’adapter aux activités humaines.
Pour les préserver, les élus locaux ont désormais obligation d’identifier et de cartographier les principaux corridors écologiques de leur commune au sein des plans locaux d’urbanisme.
Le rôle des jardins dans les corridors écologiques
Chacun de nous peut également agir à son niveau, notamment en faisant de son jardin ou de son balcon un espace d’accueil et de transit. Dans le cas du hérisson par exemple, des études menées en Angleterre montrent que la création de passages, aménagés dans les clôtures pour mieux connecter les jardins, facilite sa circulation et sa survie à l’échelle d’un quartier.
C’est pourquoi en France, des programmes participatifs comme le programme Piqu’Caen encourage les propriétaires de jardin à collaborer, pour créer des « autoroutes à hérissons » dans leur quartier.
Les sciences participatives
Les espèces les plus ordinaires étant parfois les plus méconnues, plusieurs programmes des sciences participatives invitent également les citoyens à aider les scientifiques à évaluer l’état de la biodiversité qui nous entoure : : plantes sauvages, oiseaux, papillons, escargots ou encore vers de terre, vous pouvez apprendre à mieux connaître les espèces qui vous intéressent tout en faisant avancer la science !
Sources
- Denis Couvet, Canal-uved. (2014, 9 octobre), Biodiversité ordinaire : enjeux, préservation, in Gestion de la biodiversité. [Vidéo]. Canal-U. https://www.canal-u.tv/53821.
- Sébastien TURPIN, Simon BÉNATEAU | Vigie-Nature*, Connaître la biodiversité ordinaire https://formation.vigienatureecole.fr/seance3/co/Partie3_Connaitre_la_biodiversite_en_ville.html*
- Gazzard A, Boushall A, Brand E, Baker PJ *(2021) An assessment of a conservation strategy to increase garden connectivity for hedgehogs that requires cooperation between immediate neighbours: A barrier too far? PLoS ONE 16(11): e0259537. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0259537*
- Gloucestershire Wildlife Trust (2021), Investigating the effectiveness of Hedgehog highways https://www.gloucestershirewildlifetrust.co.uk/sites/default/files/202101/Hedgehog Report_2.pdf